17 septembre 2018
En campagne électorale, il est de bon ton pour les partis politiques de manifester leur soutien à notre système public d’éducation. Mais habituellement, quand les chefs et les candidats parlent d’éducation, il est beaucoup question de la pénurie d’enseignantes et d’enseignants, ou de l’état des bâtiments.
On parle rarement du personnel de soutien scolaire. Malheureusement, cette campagne électorale ne fait pas exception.
La pénurie qu’on ne veut pas voir
Pourtant, dans l’ensemble des commissions scolaires à travers le Québec, il y a une sérieuse situation de manque de personnel de soutien qui ne fait que s’aggraver. La pénurie s’étend partout, jour après jour, mais politiciens et administrateurs semblent ne rien voir… ou ne rien vouloir voir.
Pourtant, nos écoles, centres et commissions scolaires ne peuvent tout simplement pas se passer du personnel de soutien scolaire. Que ce soit pour l’entretien des infrastructures, l’accompagnement et le soutien aux élèves, l’administration, les services de garde, le transport scolaire et bien d’autres secteurs, la contribution du personnel de soutien scolaire est essentielle à la bonne marche quotidienne de notre système public d’éducation.
Une marche qui risque de devenir bientôt de plus en plus boiteuse, faute de personnel de soutien scolaire en nombre suffisant. Peut-on vraiment laisser la situation dégénérer encore plus?
Un aveuglement volontaire dangereux
Par les multiples occupations et responsabilités qu’il assume, le personnel de soutien scolaire est omniprésent et incontournable dans notre système scolaire. Comment peut-on demeurer silencieux et faire comme si de rien n’était devant une pénurie qui affecte des travailleuses et des travailleurs provenant de 81 classes d’emplois différentes?
Il y a une limite à l’aveuglement volontaire. Une réalité ne s’efface pas parce qu’elle nous déplaît et qu’on refuse de la voir. Elle finit tout simplement par nous éclater en plein visage. Si on ne veut pas en arriver là avec la pénurie qui affecte le personnel de soutien scolaire, les politiciens et les chefs de partis politiques qui aspirent à diriger le Québec doivent prendre des engagements clairs pour y mettre fin.
Les causes bien réelles de la pénurie
La pénurie n’est pas le fruit du hasard. Elle est provoquée par des causes réelles, notamment par des conditions de travail précaires et inacceptables qu’on impose au personnel. Qui accepterait un emploi d’éducatrice en service de garde de treize heures par semaine, qui rend bien difficile le paiement des factures à la fin du mois? Comment peut-on penser attirer ou retenir des secrétaires et des ouvriers quand on leur verse un salaire inférieur au secteur privé, à la fonction publique municipale ou fédérale?
Est-il normal que 56 % des travailleuses et des travailleurs du personnel de soutien scolaire dénoncent le fait que leur salaire est insuffisant pour répondre à leurs besoins et à leurs obligations?1
En même temps qu’on ne les paie pas assez, 48 % d’entre eux doivent travailler durant leurs pauses, l’heure du dîner, ou prolonger leur journée de travail pour faire face à des responsabilités qui augmentent sans cesse.1 Les trois quarts constatent un alourdissement de leurs tâches. L’épuisement vient donc s’ajouter au stress engendré par la précarité. Faut-il se surprendre que plus de 80 % de ces personnes se disent exténuées?1 On le serait à moins.
Un iceberg à l’horizon
Si les politiciens et les administrateurs de nos commissions scolaires continuent de fermer les yeux sur les conditions de travail inhumaines qu’on impose à ces travailleuses et travailleurs, alors la situation du personnel de soutien scolaire risque de devenir bientôt l’énorme iceberg contre lequel notre système public d’éducation risque de se heurter.
Aux chefs de partis politiques de nous dire, d’ici le 1er octobre, ce qu’ils entendent faire pour éviter le naufrage…
Éric Pronovost, président de la Fédération du personnel de soutien scolaire (FPSS-CSQ)